L’heure bleue

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Policiers et thrillers
Par François Lechat

C’est le troisième roman de Paula Hawkins que je lis (sur cinq déjà parus), et je crains que ce soit le dernier. Non qu’il soit mauvais, loin de là. Il se laisse lire de manière fluide, il installe un certain suspense, il comporte des chapitres réussis. Mais il n’apporte rien de neuf par rapport à La fille du train ou à Celle qui brûle.

Le problème de Hawkins est qu’elle s’enferme dans ses procédés : abondance de flashbacks, extraits de correspondance ou de journal intime, personnages cabossés porteurs d’un secret, intrigues de thriller donnant lieu à des considérations psychologiques, moments d’accalmie après une explosion de violence… En l’occurrence, tout cela ralentit l’intrigue, la dilue, fait sans cesse retomber la tension. Sans que l’héroïne, une artiste de renommée mondiale à la personnalité torturée, soit assez originale pour marquer le lecteur.

Les personnages secondaires sont plus intéressants, surtout l’un d’entre eux, et l’atmosphère des lieux, une île écossaise battue par les vents, est bien rendue. Mais tout cela paraît assez fabriqué, calculé. Il manque à Hawkins, soit du lâcher-prise, soit assez de méchanceté pour oser un livre qui dérange.

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Paula Hawkins
L’Heure bleue

Sonatine
2024

3 livres à succès qui nous ont plutôt déçus

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Les Armes de la Lumière

Littérature anglophone (Royaume-Uni)
Stylo-trottoir : ce que Pierre vient de lire

Les Armes de la Lumière sera le dernier opus de la fresque de Kingsbridge commencée avec Les Piliers de la Terre. Pierre nous avait parlé d’Une Colonne de Feu. Ce roman-ci se passe deux siècles après le précédent (Le Crépuscule de l’Aube).

« On est au temps des filatures, de l’évolution avec les premières machines à vapeur, la montée des syndicalismes, travailleurs contre patrons, et les guerres napoléoniennes », explique Pierre avec un enthousiasme modéré. Car, pour lui, le roman reste assez classique, les personnages se partagent entre les bons et les moins bons… Un effet de lassitude devant le Xème roman de Ken Follett conçu de la même façon ? « Mais ça se lit et on a envie de connaître la suite. »

Angle mort

Policiers et thrillers (Grande-Bretagne)
Une brève de Florence Montségur

Je viens de relire les articles sur La fille du train et Celle qui brûle. La régression s’accentue, hélas. Angle mort est décevant. Il y a peu de substance, peu de psychologie, peu de suspense… Les ingrédients sont classiques et employés platement (il y a de l’orage quand les choses vont mal). On sent que l’auteure devrait respirer un peu, attendre la bonne histoire et une réelle envie d’écrire. Je l’ai fini car il se lit vite et que ce sont les vacances.

Rocky, dernier rivage

Littérature francophone (Belgique)
Par Catherine Chahnazarian

J’ai lu ce roman presque d’une traite, en me demandant sans cesse « Mais où vont ces personnages ? », « Mais où va l’auteur ? ». Et j’ai été déçue par la fin, mais ce n’est pas ce qui compte. C’est que, à travers le survivalisme, le thème de cette fiction au drôle de titre est notre incapacité à changer de mode de vie alors même que ça urge, le temps inouï qu’il nous faut pour nous adapter à la réalité du réchauffement climatique, notre indifférence au sort des autres, notre égoïsme et en particulier celui des – de certains – riches… Genre « on va droit vers l’apocalypse », mais dans un roman léger, qu’il serait facile de prendre au premier degré comme si ce dont il est question n’était pas si grave. L’intrigue est bien construite (sauf, à mon avis, pour la temporalité) et bien écrite, les personnages (sauf celui du père, qui n’est pas très bien maîtrisé) sont bons, Gunzig distille un humour discret… mais comme s’il s’agissait de nous distraire, alors que le message est autrement ambitieux. J’ai été très gênée par ce décalage. Le traitement psychologique est ahurissant. Pour le dire autrement, ça manque de tripes, c’est impossible de croire au désastre qui est supposé s’être produit, impossible de croire aux réactions des personnages. Et en même temps, quelque chose a fait que je l’ai lu presque d’une traite. Ce roman me laisse tout à fait perplexe.

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Ken Follett
Les Armes de la Lumière
Éditions Robert Laffont
2023

Paula Hawkins
Angle mort
Traduction : Corinne Daniellot
Éditions Sonatine
2023

Thomas Gunzig
Rocky, dernier rivage
Éditions Au Diable Vauvert
2023

Celle qui brûle

Paula Hawkins, Celle qui brûle, Sonatine, 2021

— Par François Lechat

J’avais beaucoup aimé La fille du train, succès planétaire qui a révélé Paula Hawkins. J’en garde le souvenir d’un thriller à suspense, d’une héroïne complexe et attachante et d’images hallucinatoires dont on ne savait pas si elle étaient dues à l’alcool, à un dérèglement psychique ou à la réalité.

A bien des égards, on retrouve les mêmes ingrédients dans Celle qui brûle, nouveau thriller qui confirme l’intérêt de l’auteur pour des personnages féminins cabossés par la vie. Il y en a même trois, ici, toutes les trois en colère et toutes liées, d’une manière ou d’une autre, à un étrange assassinat.

S’il m’a diverti, car il ménage un réel suspense et un beau coup de théâtre, ce dernier livre m’a pourtant un peu déçu. En y réfléchissant, je crois qu’il est trop prévisible. La construction est complexe, avec trois focalisations parallèles, mais on a vite compris la manière dont le récit allait progresser. Et l’insertion, entre différents chapitres, d’extraits d’un texte en italiques dont l’auteur n’est pas dévoilé tombe à plat, car on comprend trop vite le lien entre ce texte adjacent et le récit principal. Paula Hawkins brosse fort bien ses personnages, réussit ses dialogues et maîtrise son tableau. Mais il manque à son dernier roman un brin de folie ou d’authenticité, quelque chose de vivant qui briserait cette trop belle construction.

Catégorie : Policiers et thrillers (Grande-Bretagne). Traduction : Corinne Daniellot et Pierre Szczeciner.

Liens : chez l’éditeur ; interview France Inter.

La fille du train

Paula Hawkins, La fille du train, Sonatine, 2015 (existe en Pocket)

— Stylo-trottoir de Catherine Chahnazarian (19 juin 2015)

Tout à l’heure, j’étais dans le train Paris-Lille et il y avait une fille qui lisait La fille du train ! Alors je lui ai demandé, à la fille du train, si c’était bien, La fille du train, et elle m’a répondu :
– Hum ?
– Excusez-moi de vous déranger. Je vous demandais si c’était bien, votre livre.
– J’adore !!! qu’elle m’a répondu en y replongeant immédiatement et en refermant les écoutilles.

— L’avis de François Lechat (15 août 2015)

Je confirme : c’est passionnant, addictif, un suspense très bien fichu, très bien construit. Sans ambition particulière, du pur divertissement, mais très fin au plan psychologique. A ne pas manquer si l’on aime voir comment les femmes se confrontent aux hommes et à leurs propres démons.

Catégorie : Policiers et thrillers (Grande-Bretagne). Traduction : Corinne Daniellot.

Liens : en Pocket.

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