Un tout petit monde

Hommage à David Lodge (1935-2025) – 5

La Trilogie du campus : Changement de décor, Un tout petit monde, Jeu de société

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Littérature étrangère (Grande-Bretagne)
Par Daniel Kunstler

Un récit situé dans un passé même rapproché ne reste d’actualité que dans la mesure où il informe le présent. Changement de décor et Jeu de Société traitent comiquement, d’une part, d’un monde universitaire qui se radicalise dans les années 1960, de l’autre du déclin industriel du Royaume-Uni dans les années 1980. Ces moments ont durablement marqué le cours de l’histoire.

Un tout petit monde, c’est autre chose. Le contexte est celui de conférences littéraires internationales aux sujets éphémères qui ne passionnent personne, pas même les participants, à moins que leurs communications contribuent à leur rang socio-académique. Ce qui les intéresse bien plus, c’est de voyager dans le luxe, boire comme des marins en permission, et s’offrir des aventures libertines aux frais de la princesse.

L’histoire est certes cocasse, faisant tours et détours drôles et inattendus. Ainsi, dix ans plus tard, les deux protagonistes de Changement de décor ont inversé leurs rôles. Le chaud lapin américain, Morris Zapp, s’est calmé avec l’âge, et se soucie plus de son statut et de ses finances. Par contre, Phillip Swallow, l’anglais terne du premier roman de la Trilogie, a pris goût, lors de son séjour en Californie, à l’exubérance sexuelle qui règne sur le campus américain auquel il est détaché. Un troisième personnage, Persse, un irlandais vertueux et attendrissant, s’éprend d’une conférencière et la poursuit en vain sur trois continents…

Le problème pour moi, en tant que lecteur, est que le contexte me paraît plus désuet que celui des autres volets de la Trilogie. David Lodge, lui-même professeur de lettres, est bien assez expert en la matière pour se moquer des forums centrés sur des sujets ésotériques sans suite, telle la subtile distinction entre signifiants et signifiés dans l’œuvre de romanciers que personne ne lit. Mais la princesse aux frais de laquelle tout se passe est de nos jours bien plus près de ses sous, et préfère placer ses fonds ailleurs : le cadre d’Un tout petit monde n’est plus très réaliste.

Je me suis indéniablement amusé à la lecture de ce deuxième volet, mais un peu moins intéressé.
Jugez par vous-même.

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David Lodge
Un tout petit monde
1984

En français chez Payot & Rivages dans la traduction d’Yvonne et Maurice Couturier

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