Par Catherine Chahnazarian.
« Tous mes livres sont sur le pouvoir », dit Robert Harris (2019). C’est pourquoi on y trouve toujours l’ambition, la vanité, le courage, la lâcheté, le secret, le mensonge, l’admiration, la peur et quelques autres ingrédients qui font mouche. Robert Harris sait nous parler de choses qui font partie de nous : il sait s’adresser à notre culture, pas celle qu’on étale mais celle qui nous a façonnés. Dans ses histoires, il y a l’Histoire, et la nature humaine, la nôtre et celle de ses personnages, qu’on ne peut mettre à distance, qu’on découvre, qu’on vit et qui laissent des traces en nous comme si on les avait croisés. Il nous emmène aussi bien dans la Rome antique (avec Pompéï et la trilogie autour de Cicéron : Imperium, Conspirata, Dictator) que dans l’Allemagne nazie (Fatherland, Munich), l’Amérique et l’Angleterre politiques récentes (L’homme de l’ombre), la France de l’Affaire Dreyfus (D.) ou le Vatican (Conclave).
Tous ses romans sont des thrillers, dans lesquels Robert Harris mêle avec une habileté déconcertante les personnages historiques et fictionnels, les lieux et les faits historiques et imaginaires. Journaliste en pratique et historien dans l’âme, il pose sur les événements un regard bien à lui, respectueux des vérités et libre face à elles. Je suis admirative de sa grande culture sans forfanterie, de son style sans effets ostentatoires, de son sens aigu de la littérature – par opposition aux auteurs qui ne sont que mots, aux romans qui ne sont que ficelles, à ceux qu’on a envie de lâcher en route et à ceux qu’on oublie aussitôt.
Certains, un peu moins aboutis, ne sont plus disponibles que d’occasion (Enigma, Archange), mais ses autres livres sont disponibles en français chez Plon dans les remarquables traductions de Nathalie Zimmermann.
J’aurais du mal à dire lequel je préfère : Conclave, peut-être, que je trouve presque parfait ; D., que j’ai adoré ; Fatherland, qui est une idée géniale et rudement bien menée ; la trilogie sur Cicéron, qui m’a fait voyager dans le temps et l’espace…
Un nouvel opus vient de sortir en anglais : The second sleep (septembre 2019). J’attends avec impatience sa traduction française. Je vous ferai une critique, pour sûr.
Robert Harris a 62 ans. Il a travaillé à la BBC et pour différents journaux anglais. Il vit en Angleterre.
Catégories : Policiers et thrillers (Grande-Bretagne) ; Extras.
Liens : Robert Harris chez Penguin, son éditeur anglais, et chez Plon. Plusieurs de ses romans ont été chroniqués sur Les yeux dans les livres ; ils sont accessibles depuis le classement par auteurs. Et voici un bon article assez récent du Guardian, pour ceux qui lisent l’anglais.