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Policiers et thrillers (USA)
Par François Lechat
Encensé par la critique anglaise, et à présent française, Vine Street est un livre qui ne s’oublie pas.
Cette plongée dans le quartier mal famé de Soho, au cours des années 1930, offre d’abord un tableau de mœurs pas piqué des hannetons : malfrats de toutes nationalités, flics véreux, bars louches, identités et pratiques sexuelles marginales, prostituées qui ne se laissent pas marcher sur les pieds… Le meurtre d’une d’entre elles installe rapidement une atmosphère plus noire, accentuée par une guerre des polices aussi impitoyable que brutale. Mais le livre décolle surtout lorsque, après un autre meurtre et plus de 200 pages, les pistes suivies jusque-là s’avèrent foireuses et un assassin plus inquiétant se profile, dont la traque prendra plusieurs décennies et 450 pages supplémentaires. Le tout dans un va-et-vient entre plusieurs époques et un jeu de pistes soigneusement distillé.
Du pur polar, donc, addictif et distrayant ? Pas seulement, car Dominic Nolan, par petites touches, confronte ses personnages à des événements historiques qui les dépassent (la montée des fascismes, le bombardement de Londres dans les années 1940…) et à des choix qui les façonnent, y compris sur un terrain familial inattendu dans un roman noir. Peut-on être un bon flic quand on aime la violence ? Etre à la fois véreux, homosexuel dissimulé et chasseur de serial killer ? Se découvrir soi-même dans la peau d’un autre ? Considérer que la fin justifie les moyens ? Sans jamais s’appesantir, Vine Street est un livre existentialiste qu’un Sartre aurait pu adouber.
Deux petites réserves, cependant, même si elles ne doivent pas vous décourager : l’intrigue aurait pu être moins touffue, et le traducteur plus vigilant – ou l’éditeur à sa suite.
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