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Littérature française
Par Marie-Hélène Moreau
Lauréat du prix Gisèle Halimi 2023, le roman de Cécile Tlili explore le sujet des injonctions faites aux femmes. Thème maintes fois exploré ces dernières années – et à juste titre tant il est riche –, l’auteure a choisi dans ce court roman de recourir à l’exercice périlleux du huis-clos. Unité de temps – un dîner, donc –, unité d’espace – quasi exclusivement l’appartement où il a lieu –, il aurait été facile de lasser le lecteur. L’auteure parvient cependant sans peine à garder jusqu’au bout son attention grâce non seulement à un style fluide qui rend la lecture aisée mais également à de multiples rebondissements qui maintiennent éveillée sa curiosité.
En deux mots, Étienne, avocat en difficulté professionnelle, et sa compagne Claudia, une kinésithérapeute timide et effacée, reçoivent à dîner un couple de vieux amis à lui. Rémi est un professeur d’économie marié à Johar, une brillante ingénieure de la tech en passe d’être nommée à un poste important. Dans le décor de cet appartement parisien écrasé par la chaleur d’une fin d’été, ces deux femmes qui se connaissent à peine et que tout oppose vont chercher chacune à sa façon à se libérer du carcan que les hommes, mari ou collègue, et plus généralement la société, tentent de faire peser sur elles.
L’exercice aurait été parfaitement réussi si les personnages ne tombaient trop souvent dans une caricature un peu trop appuyée. C’est sans doute ce travers qui fait qu’on peine non seulement à s’attacher aux différents protagonistes – y compris les féminins, ce qui est un comble ! –, mais également à croire complètement à l’enchaînement des révélations de cette soirée. Dommage, car l’ensemble livre une description fine des rapports de domination qui pèsent sur les femmes et propose quelques scènes bien imaginées et décrites.
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Cécile Tlili
Un simple dîner
Éditions Calmann-Lévy
2023

Désolée si je vous ai semblé sévère mais retenez également le positif de mon commentaire. Je trouve ce livre réussi, pas parfaitement réussi comme je le disais, mais réussi quand même. Simplement, j’ai regretté le côté parfois trop caricatural des personnages (la kiné est très très effacée, son conjoint très très antipathique…). Cela n’est que mon avis, bien sûr. Mais vous avez raison, on n’est pas obligé de s’attacher aux personnages, le mot est sans doute mal choisi. Je l’ai utilisé dans le sens, non pas d’un attachement affectif, mais plutôt dans le sens d’y croire (il y aurait eu répétition si j’avais utilisé à nouveau ce mot !).
Je vous trouve bien sévère. J’ai adoré ce roman très bien construit. L’autrice réussit à mettre à distance le/la lecteur/trice des personnages pour qu’il/elle puisse exercer pleinement son esprit critique sur leurs comportements. Pourquoi faudrait-il toujours « s’attacher » aux personnages ?