Le liseur du 6h27 — La fissure

Littérature française
Par Anne-Marie Debarbieux

Il y a quelques années, l’auteur nous avait séduits avec Le liseur du 6h27 dans lequel Guylain, que ses proches pensent bras droit d’un éditeur, est en réalité chargé de déverser dans une énorme broyeuse des stocks de livres invendus. Il conjure ce métier destructeur dont il a honte en récupérant au hasard des feuillets rescapés dont il fait lecture à voix haute chaque matin dans le RER de 6h27. Il acquiert ainsi un public conquis et fidèle et il est même sollicité pour faire des lectures dans une maison de retraite. Expérience gratifiante qui séduit un auditoire qui l’écoute avec enthousiasme, séduit surtout par la convivialité que suscite sa prestation. Sa vie reprend sens. Puis un jour, Guylain trouve dans le RER une clé USB, il y découvre une sorte de journal qui le touche et il n’a de cesse d’en retrouver l’autrice, vouée elle aussi à un quotidien peu gratifiant.

Ce petit livre, à la fois original et rempli d’humanité, m’a poussée à découvrir un nouveau roman de Jean-Paul Didierlaurent.

Dans La fissure, une entreprise de fabrication artisanale de nains de jardin agonise devant la concurrence chinoise. Xavier, qui en était depuis des années l’une des chevilles ouvrières en tant que responsable commercial, voit sa vie professionnelle s’effondrer. Il se réfugie alors dans sa petite résidence secondaire des Cévennes qu’il rénove avec passion depuis plusieurs années avec l’aide de sa femme. Mais il découvre une fissure dans un mur de la terrasse, qu’il tente en vain de colmater. Dès lors le lecteur comprend que c’est toute sa vie qui commence à se lézarder et que la fissure en est le signal d’alarme. Xavier remet tout en question et décide de changer complétement de vie, il quitte même son épouse pour entreprendre un long voyage avec pour seul compagnon le dernier nain de jardin fabriqué par son entreprise, un personnage un peu facétieux et pittoresque curieusement doté de la parole, qui s’exprime librement et donne son avis sur tout. Commence alors une épopée burlesque et touchante à la fois, qui mène Xavier à l’autre bout du monde et constitue l’essentiel du roman.

C’est drôle souvent, émouvant parfois, sans doute invraisemblable, mais l’on s’attache à cette sorte de fable qui évite assez bien les écueils d’un récit qui pourrait n’être qu’une métaphore facile et un peu farfelue. Ce n’est pas un grand livre – il n’en a sans doute pas la prétention – mais, comme Le liseur, il est original et se lit avec plaisir.

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Jean-Paul Didierlaurent

Le liseur du 6h27
Au Diable Vauvert (2014)
Folio (2022)

La fissure
Au Diable Vauvert (2018)
Folio (2019)

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