Eric Dupont, Bestiaire, éditions du Toucan, 2015
Par François Lechat.
Ceux qui ont lu, et forcément aimé, La fiancée américaine d’Eric Dupont retrouveront dans Bestiaire toutes ses qualités, sauf une. Quoique en dise l’éditeur en couverture, Bestiaire n’est pas vraiment un roman mais plutôt un ensemble de souvenirs romancés, fictionnés, travaillés avec amour, mais présentés pratiquement sans trame narrative, sans suspense.
Cela n’enlève pas grand’ chose au plaisir de la lecture, mais cela impose un autre rythme : on peut musarder, laisser passer du temps entre deux chapitres. Mais pas trop quand même, pour ne pas perdre l’ambiance, et l’époque, et cette manière si étonnante que possède l’auteur de poétiser tout ce qu’il touche. Mieux vaut sans doute avoir au moins 50 ans pour bien apprécier ce livre fin et sensible qui évoque Nadia Comaneci, le souverainisme québécois, l’aventure du Spoutnik, René Lévesque et tout ce qui pouvait frapper un préadolescent dans le Québec des années 70-80. Eric Dupont a conservé sa voix inimitable de conteur à la veillée qui introduit une touche d’humour, de distance et de tendresse dans tout ce qu’il rapporte, sans qu’on puisse jamais décider si c’est l’enfant qu’il était ou l’adulte qu’il est devenu qui parle. A la différence de La fiancée américaine, Bestiaire est trop modeste pour faire un grand livre, mais celui-ci apporte un plaisir rare : vous ne verrez pas de sitôt un enfant appeler son père et sa belle-mère, après le divorce de ses parents, « Henri VIII » et « Anne Boleyn »…
Catégorie : Littérature étrangère francophone (Québec).
Liens : chez l’éditeur. Voir aussi La fiancée américaine d’Eric Dupont.
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