James Lasdun, La Chambre d’ami, Sonatine, 2017
Par François Lechat.
Il n’est pas facile de renouveler le genre du thriller psychologique, surtout quand on prend pour thème un triangle amoureux. L’auteur, ici, joue sur trois astuces. D’abord, il ajoute à ce triangle une dimension familiale (les liens compliqués entre deux cousins), une dimension sociale (un riche banquier face à un cuisinier en difficulté) et un suspense policier (une grosse somme d’argent qui pourrait susciter des convoitises). Ensuite, il embarque deux des membres de son triangle initial dans un autre triangle, sans perdre le troisième de vue puisque c’est le personnage principal à défaut d’être un héros. Enfin, il s’arrange pour que ces triangles n’en soient pas vraiment, car un de leurs côtés n’a pas conscience d’en être – je ne veux pas en dire plus long, évidemment. Sur cette base, James Lasdun impose son art du suspense dès les premières pages, prend ensuite son temps pour creuser les interrogations et les arrière-plans psychologiques de tout ce petit monde, et tisse sans en avoir l’air une intrigue qui culmine dans deux scènes d’une intensité inouïe, dont il semble évident que Hollywood va s’emparer un de ces jours. C’est intelligent, subtil et visuel, un peu introspectif comme souvent dans la littérature américaine. Mais c’est d’abord, sans crier au chef-d’œuvre, un parfait mariage entre le plaisir du polar (le lecteur est en position de voyeur comme l’est un des personnages) et le questionnement existentiel : plus qu’un divertissement mais tout un divertissement. Et une couverture magnifique, au toucher comme à la vue.
Catégorie : Policiers et thrillers (Grande-Bretagne). Traduction : Claude et Jean Demanuelli.
Liens : chez l’éditeur.
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