Dario Franceschini, Ailleurs, Gallimard, collection L’Arpenteur, 2017
Par François Lechat.
C’est bien connu, en tout cas en France : on ne fait pas de bonne littérature avec de bons sentiments. Cette maxime n’a peut-être pas cours en Italie, où l’actuel ministre de la Culture a publié en 2011 ce court roman joliment publié dans une des plus élégantes collections de Gallimard (ce qui compense les petites fautes de la traductrice). L’histoire est banale, à certains égards, mais bien faite aussi pour voyager dans l’esprit et dans l’espace. Dans un village près de Ferrare, le notaire Ippolito Dalla Libera, un parangon de vertu et de rigueur, révèle à son fils, aussi notaire et aussi coincé que lui, qu’il a eu 52 enfants cachés avec 52 prostituées et que son fils doit les retrouver avant sa mort. S’ensuit une enquête sur la double vie de ce père-la-pudeur, qui conduira évidemment notre héros à découvrir des horizons insoupçonnés et, au travers d’une prostituée au grand cœur prénommée Mila, à s’ouvrir à des sentiments et à des comportements jusque-là inaccessibles. Rien de très original, donc, sauf que l’auteur ménage de véritables surprises, nous offre quelques trouvailles (dont une jolie manière de rédiger des épitaphes), et va jusqu’au bout de sa logique en soignant le style, le tempo, la peinture délicate et complice des découvertes de ce notaire qui nous devient de plus en plus sympathique car nous aimerions bien, nous aussi, retrouver le souffle de la liberté. A lire pour se sentir humain, et pour un sens aigu des détails et des dialogues.
Catégorie : Littérature étrangère (Italie). Traduction : Chantal Moiroud.
Liens : chez l’éditeur.
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