Julie Wolkenstein, Les Vacances, P.O.L., 2017
Par François Lechat.
L’Obs, évidemment, n’avait pas manqué de saluer ce roman d’intello pour intellos. Deux personnages mènent la narration en alternance : Sophie, prof de lettres à la retraite, et Paul, jeune doctorant qui consacre sa thèse à des films que personne n’a jamais pu voir. Ils se rencontrent à force de vouloir, l’un comme l’autre, se documenter sur le premier film d’Eric Rohmer, Les Petites filles modèles, tourné en 1952. Un film inspiré de la comtesse de Ségur, dont Sophie est une grande spécialiste, et qui a donné les prénoms de Sophie et de Paul à deux de ses plus célèbres personnages. Le reste est de la même eau : l’auteure déroule une double enquête, assez amusante, autour des péripéties qui ont pu entourer ce film englouti, et cela ne peut intéresser que les érudits à la mode d’aujourd’hui, qui ne consiste plus, à l’université, à forger des théories mais à accumuler des détails signifiants. C’est charmant si on aime ça : on voyage en Normandie, on découvre les locaux de l’IMEC, on suit vaguement la trace de Rohmer, Robert Badinter passe un coup de téléphone à Sophie à propos d’un producteur noir qui a été associé au film disparu, des revues d’époque un peu coquines nous en disent plus long sur les actrices du film, qui se partageaient entre cinéma et cabarets douteux… Si vous êtes mêlé au monde universitaire, vous trouverez de l’intérêt à cette tranche de vie et à ces coïncidences, tout en vous rappelant qu’en effet, comme le suggère le livre, cet univers est triste et banal sous ses dehors prestigieux. Sinon, sur le même sujet, relisez plutôt David Lodge, qui racontait le même genre de choses avec légèreté et humour, lui.
Je suis sans doute injuste, car l’intention première de ce roman est de nous ramener, avec ses deux héros, sur les traces de l’enfance. Mais ce thème est un peu prévisible, de sorte que c’est plutôt l’ethnographie des mœurs universitaires qui ressort de l’ensemble. De l’inconvénient de mêler deux sujets ?
Catégorie : Littérature française.
Liens : chez l’éditeur.
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