Florida

Olivier Bourdeaut, Florida, Finitude, 2021

— Par Brigitte Niquet

Fan de la première heure d’En attendant Bojangles, déçue par un Pactum Salis de la deuxième heure qui ressemblait plus à une mauvaise blague de potaches attardés qu’à un roman noir, j’attendais avec impatience que sonne la troisième heure : Bourdeaut allait-il redresser la barre après ce regrettable écart ? Pendant toute la première partie, j’ai cru que oui.

Il n’a pourtant pas choisi la facilité en s’attaquant cette fois à l’infecte mascarade que représentent les concours de mini-miss. Généralement coachées par leurs parents, bardées de rubans, de colifichets et d’accessoires censés exalter leur féminité naissante, ces gamines ont environ sept ans quand leurs géniteurs (souvent leurs mères) les jettent dans l’arène, et gare à elles si elles déçoivent. La sanction sera sans pitié. Beaucoup ne s’en remettront jamais.

Elizabeth, l’héroïne de Bourdeaut, s’en remet, si l’on peut dire, c’est-à-dire qu’au lieu de sombrer, elle acquiert le goût du combat et de la rébellion, qu’elle gardera chevillé au corps pour le restant de ses jours. Quittant l’univers des mini-miss, elle intégrera celui du body building avec un seul but : s’autodétruire, et détruire ses parents par ricochet. C’est par elle que l’histoire nous est narrée, dès le début, via un vrai/faux journal intime où elle déverse avec une gouaille féroce sa rancœur et son mal de vivre. C’est extrêmement bien écrit, avec tout le talent d’un écrivain dans la force de l’âge qui réussit à nous faire croire que c’est une petite fille puis, plus tard, une jeune fille qui le rédige, sans que cela vire jamais à la caricature. Bravo !

Pourquoi mes réticences du début, alors ? C’est que le livre est divisé en deux parties inégales, la seconde étant de loin la plus longue, et que, tout en restant d’un remarquable niveau d’écriture, elle « tire à la ligne ». La jeune fille qu’est devenue Elizabeth ne cesse d’y dégorger sa haine et son désir de vengeance, et cette logorrhée sans nuance finit par lasser et devenir fastidieuse. Dommage. Faudra-t-il attendre la quatrième heure pour que Bourdeaut, sans pour autant bégayer, tende enfin la main à un autre Bojangles ?

Catégorie : Littérature française.

Liens : chez l’éditeur ; toutes nos critiques de Bourdeaut sont accessibles depuis le classement par auteur à la lettre B.

Un commentaire sur “Florida

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  1. Comme souvent, je suis d’accord avec toi Brigitte. L’écriture y est remarquable. Le sujet de départ bien choisi et intéressant mais le livre n’en finit pas d’en finir. Trop longue, trop noire cette vengeance sous forme d’autodestruction jusqu’à la phase finale. Je ne sais pas si c’est le fait d’écrire sur Pc ou Mac, mais beaucoup d’auteurs actuels ne savent plus se limiter et condenser leurs écrits. A trop distiller leurs propos, leurs lecteurs finissent par survoler les pages.

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