À l’ombre des loups

Alvydas Šlepikas, À l’ombre des loups, Flammarion, 2020

— Par Brigitte Niquet

L’homme est un loup pour l’homme.

1946. La Seconde Guerre mondiale vient de s’achever. Ce n’est pas pour autant que chacun rentre chez soi, du moins pas tout de suite. Comme souvent, avant de plier bagage, les vainqueurs profitent de leur avantage pour tuer, violer, piller, massacrer impunément et même avec la bénédiction de leurs chefs… Prenons un exemple parmi d’autres : en Prusse orientale, les Allemands sont chassés de chez eux, traqués, rackettés, et les ordres que reçoivent les soldats soviétiques vainqueurs sont clairs : « Tuez tous les Allemands. Et leurs enfants aussi. Il n’y a pas d’Allemand innocent ». Les Russes tirent donc les enfants comme des lapins dès qu’ils mettent le nez dehors. Un petit village qui fut florissant ne compte plus que quelques isolés (femmes, enfants, vieillards…) qui se planquent. On ne sait ce que sont devenus les adultes, sans doute morts, en tout cas ils ne sont pas rentrés dans leurs familles. Pour tout arranger, c’est l’hiver et il fait un froid… sibérien. Il n’y a rien à manger, rien non plus pour se chauffer… Le seul espoir serait de gagner la Lituanie voisine, en se cachant dans la forêt à la moindre alerte. Malheureusement, les Lituaniens n’ont pas spécialement envie d’accueillir ces réfugiés. Et les loups rôdent. Certains enfants vont pourtant tenter l’aventure et l’auteur, s’appuyant pour cela sur le témoignage de deux survivantes, s’attache particulièrement au sort d’une famille : Eva, Martha et leurs quatre enfants. Les oubliés de l’histoire ont un nom, l’horreur s’humanise.

Passé les premières pages que l’on prend comme un coup de poing, le lecteur se demande comment il va pouvoir supporter un livre entier sur un tel sujet. Et pourtant, il peut. Je n’ai entendu personne dire qu’il avait abandonné sa lecture en cours de route. L’horreur n’est en rien enjolivée mais après une magnifique première page vibrante d’empathie, elle est décrite de manière neutre et détachée, presque purement informative. Šlepikas a sans doute pensé qu’elle se suffisait à elle-même et il a bien fait. Quels commentaires ajouter qui ne soient pas superflus et redondants ? Ce petit livre est magnifique, formidablement écrit dans son apparente simplicité, il rend indirectement hommage à tous les oubliés de l’histoire et seules les âmes très très sensibles sont invitées à s’abstenir. Quoique…

Catégorie : Littérature étrangère (Lituanie). Traduction : Marija-Elena Baceviciute.

Liens : chez l’éditeur.

La vie en chantier

Pete Fromm, La vie en chantier, Gallmeister, 2019

— Par Brigitte Niquet

Voilà un livre hors normes, qui débute un peu comme un conte de fées moderne. Marnie et Taz sont jeunes et beaux, un peu immatures, ils s’aiment à la folie et s’occupent de retaper une vieille maison pour en faire leur nid d’amour. Ça n’avance pas vite (trois ans de chantier, déjà !), mais ils ont tout leur temps. Croient-ils. Car voilà que Marnie chuchote à l’oreille de Taz la phrase-code fatidique sur laquelle ils se sont mis d’accord : « L’aiglon a atterri ». Autrement dit, Marnie est enceinte. C’est un peu tôt, mais quoi ? À coeur vaillant, rien d’impossible. Ils mettent les bouchées doubles pour la maison, un peu coincés quand même par le manque d’argent et l’ampleur de la tâche. Mais une petite fille est annoncée, c’est l’essentiel, et elle s’appellera Midge. Ainsi en a décidé sa mère. Elle va naître dans un joyeux foutoir mais tout va bien.

A vrai dire, bien que séduit par la force de vie qui émane de la jeune femme et amusé par la fausse décontraction de Taz, le lecteur se dit que les péripéties de la vie conjugale et, sans doute ensuite, celles de la vie avec un nouveau-né ne sauraient le retenir au-delà d’une cinquantaine de pages. Qu’il se rassure. Un événement brutal va tout remettre en cause : Marnie meurt en couches et Taz se retrouve veuf, seul chez lui dans une maison en chantier, avec un bébé qu’il est censé nourrir, changer, baigner, etc. A priori, mission impossible pour ce jeune homme insouciant bombardé tout d’un coup responsable de nursery. Les 350 pages restantes (sur 384) sont l’histoire de ce couple bancal mais fusionnel Midje/Taz, auquel viennent s’ajouter des personnages secondaires très attachants, pas banals pour un sou et aux réactions parfois surprenantes. On ne s’ennuie pas un instant, d’autant que le style de l’auteur est souvent franchement désopilant, brasse pêle-mêle les bons sentiments et les moins bons, et qu’on est presque déçus que le livre s’arrête : on en aurait bien repris une tranche !

Catégorie : Littérature anglophone. Traduction : Juliane Nivelt.

Liens : chez l’éditeur.

Du théâtre pour la rentrée : La guerre de Troie n’aura pas lieu

Jean Giraudoux, La guerre de Troie n’aura pas lieu, 1935 (disponible chez Flammarion)

— Par Brigitte Niquet

Voici un spectacle qui a fait des incursions récurrentes dans ma vie (notamment quand j’ai eu le plaisir, il y a quelques années, d’interpréter Hécube, la reine-mère) et je ne l’ai pas toujours considéré sous le même angle, sa richesse permettant bien des approches. Limitons-nous à l’essentiel, son thème, dont les échos ne cessent de résonner dans le monde actuel : sans se priver de gaudriole et de moments comiques quasi moliéresques, l’auteur a voulu faire de son œuvre un brûlot anti-guerre, évoquant clairement la menace qui pesait alors sur les relations franco-allemandes, de plus en plus tendues. Jean Giraudoux, sous prétexte de raconter la guerre de Troie (sujet de L’Iliade), garde toujours en ligne de mire la future Seconde Guerre mondiale, comme s’il voulait donner un avertissement déguisé, bien qu’il soit sans illusions. Théâtre engagé, donc, mais jamais ennuyeux. En homme de théâtre accompli, Giraudoux n’oublie jamais de pimenter son récit dramatique de scènes grand-guignolesques — en particulier lorsque se manifeste l’inénarrable Demokos, un pitre, véritable caricature. C’est lui, dont le bellicisme n’a d’égal que la bêtise, qui déclenchera finalement la guerre. Grecs contre Troyens, Allemands contre Français, peu importe la nationalité, peu importe l’époque, les hommes ne savent pas vivre en paix et, dans la pièce comme dans la réalité quelques années plus tard, la guerre aura bien lieu, broyant tout et tous sur son passage. Quant à notre monde moderne, incapable de tirer les leçons du passé et surtout d’y conformer son comportement, il est toujours prêt à s’enflammer, ici ou là-bas. Giraudoux était un visionnaire et c’est, bien sûr, le principal intérêt de cette pièce. Malheureusement, tel Cassandre, il a prêché dans le désert.

Jean Giraudoux (à droite) pendant une répétition de La guerre de Troie n’aura pas lieu, avec Louis Jouvet et Valentine Tessier, en 1935. Ph. Coll. Archives Larbor.

Si vous ne connaissez pas la pièce, essayez de la voir dans un théâtre. Elle y est reprise de temps à autre, quoique de plus en plus rarement. Par ailleurs, il en existe de bons enregistrements sur le Net. Pour ma part, je n’ai pas connu la création à L’Athénée en 1935 sous la direction de Jean Vilar, et pour cause : je n’étais pas née… Ce n’est qu’une bonne vingtaine d’années plus tard que j’ai découvert ce chef-d’oeuvre au Festival d’Avignon, dans un cadre aussi sublime que l’étaient les acteurs : Pierre Vaneck en Hector, Maria Mauban en Andromaque, Christiane Minazzoli en Hélène. J’ai revu la pièce ensuite avec Annie Duperey, magnifique dans le rôle de la très belle et très dangereuse Hélène, tandis que rôdait, dans celui de Pâris, un certain Bernard Giraudeau, débutant mais déjà absolument craquant. J’ignore ce qui existe comme archives de ces distributions.

Mais lire la pièce, c’est très bien aussi et vous n’apprécierez que davantage la beauté et la noblesse du style.

Catégorie : Théâtre.

Liens : chez Flammarion (Librio à 2 euros), une chronique de Juliette Arnaud sur France Inter (4 min.), une bonne version vidéo (2,99 euros, 1 h 50) avec Francis Huster notamment.

Taxi Curaçao

Stefan Brijs, Taxi Curaçao, Héloïse d’Ormesson, 2015 (disponible en 10-18)

— Par Brigitte Niquet

Voici un roman dépaysant au possible, puisque tout ou presque se passe aux Caraïbes. Et ne craignez rien, ce n’est pas un « pavé » mais un modeste livre qu’on peut emmener partout, 280 pages en édition de poche.

Disons-le tout de suite, les Caraïbes n’ont rien d’un paradis de carte postale – ce paradis existe mais il est réservé aux touristes. C’est même pour beaucoup d’autochtones un enfer où quelques « justes » s’efforcent de survivre et d’élever leurs enfants en espérant que ceux-ci, peut-être, connaîtront un sort meilleur. Peine perdue le plus souvent. Certains s’en tirent par le mensonge, la vantardise, comme Roy (1ère partie), chauffeur de taxi à ses heures, qui consacre l’argent prévu pour les études de son fils à bichonner sa Dodge Matador, sa seule idole. D’autres (dont Max, son fils, le héros central), brillants à l’école, se verraient bien devenir, par exemple, instituteur mais, las, on n’échappe pas à son destin. A moins que peut-être Sonny, le dernier de la lignée…

L’histoire est racontée par Frère Daniel, un religieux en civil, maître d’école de son état, en empathie totale avec ses ouailles dont il s’efforce de sauver quelques-unes, en particulier les jeunes, quand ils ne sont pas happés avant même la fin de l’école par les dealers qui rôdent et font aux ados des promesses mirifiques auxquelles bien peu savent se soustraire.

Le monde des livres a qualifié Taxi Curaçao de « drame post-colonial construit comme une tragédie classique ». On ne saurait faire plus beau compliment. Dommage qu’il soit passé presque inaperçu à sa sortie en 2015. Le tirage en Poche chez Héloïse d’Ormesson (2018), puis en 10-18 (2020), lui offre peut-être une seconde chance. Ne la manquez pas.

Catégorie : Littérature étrangère (Belgique). Traduction du néerlandais : Daniel Cunin.

Liens : en 10-18.

Chaque automne, j’ai envie de mourir

Véronique Côté et Steve Gagnon, Chaque automne, j’ai envie de mourir, Hamac, 2012

— Par Brigitte Niquet

Voilà un livre qui ne ressemble à aucun autre, une espèce d’OVNI totalement inclassable, ce qui fait partie de son charme.  Disons, pour simplifier, que c’est un recueil de textes courts qui nous vient du Québec, pas vraiment des nouvelles ni rien qu’on puisse ranger dans des cases, mais du même coup, l’ensemble se prête très bien à diverses utilisations dont la mise en voix (les deux co-auteurs sont metteurs en scène et comédiens, il doit y avoir une relation de cause à effet !). Il s’intitule Chaque automne, j’ai envie de mourir – le titre déjà n’est pas banal. Le contenu non plus.

D’abord, les auteurs n’en sont pas vraiment (ils tiennent à le préciser), car ils se sont « limités » à susciter et collecter des témoignages, des histoires de vie, et à les transformer en chapitres de livre, avec un gros coup de pouce à l’écriture, qui n’était pas la préoccupation première des primo-écrivants. Et donc ça foisonne, ça bouillonne, ça parle de nous, ça parle de vous et, outre les lecteurs purs et durs, les metteurs en  scène ont trouvé là un terreau fertile, qui a  déjà donné lieu à plusieurs spectacles théâtraux et à des « lectures-spectacles » lors des festivals antérieurs à la COVID. Pour y avoir assisté, je peux garantir qu’il y a eu beaucoup de rires, quelques larmes et que nombreux sont ceux qui se sont précipités pour acheter le livre. Il n’en restait plus un seul quand j’ai quitté les lieux.

Ajoutons que ces tranches de vie sont d’une sincérité absolue, parfois tendres, souvent violentes – car la vie est violente, préparez vos mouchoirs pour certaines scènes – et, pour le lecteur français, bénéficient entre autres de  l’originalité du langage. On le sait, bien que francophone, le Québec a de nombreuses particularités d’expression, souvent très colorées, qui émaillent les textes et leur donnent une étonnante saveur. C’est parfois déroutant mais toujours compréhensible, et contribue, bien sûr, au dépaysement créé par ce livre. Tabernacle, que demander de plus ?

Catégorie : Nouvelles et textes courts (Québec).

Liens : chez l’éditeur.

Florida

Olivier Bourdeaut, Florida, Finitude, 2021

— Par Brigitte Niquet

Fan de la première heure d’En attendant Bojangles, déçue par un Pactum Salis de la deuxième heure qui ressemblait plus à une mauvaise blague de potaches attardés qu’à un roman noir, j’attendais avec impatience que sonne la troisième heure : Bourdeaut allait-il redresser la barre après ce regrettable écart ? Pendant toute la première partie, j’ai cru que oui.

Il n’a pourtant pas choisi la facilité en s’attaquant cette fois à l’infecte mascarade que représentent les concours de mini-miss. Généralement coachées par leurs parents, bardées de rubans, de colifichets et d’accessoires censés exalter leur féminité naissante, ces gamines ont environ sept ans quand leurs géniteurs (souvent leurs mères) les jettent dans l’arène, et gare à elles si elles déçoivent. La sanction sera sans pitié. Beaucoup ne s’en remettront jamais.

Elizabeth, l’héroïne de Bourdeaut, s’en remet, si l’on peut dire, c’est-à-dire qu’au lieu de sombrer, elle acquiert le goût du combat et de la rébellion, qu’elle gardera chevillé au corps pour le restant de ses jours. Quittant l’univers des mini-miss, elle intégrera celui du body building avec un seul but : s’autodétruire, et détruire ses parents par ricochet. C’est par elle que l’histoire nous est narrée, dès le début, via un vrai/faux journal intime où elle déverse avec une gouaille féroce sa rancœur et son mal de vivre. C’est extrêmement bien écrit, avec tout le talent d’un écrivain dans la force de l’âge qui réussit à nous faire croire que c’est une petite fille puis, plus tard, une jeune fille qui le rédige, sans que cela vire jamais à la caricature. Bravo !

Pourquoi mes réticences du début, alors ? C’est que le livre est divisé en deux parties inégales, la seconde étant de loin la plus longue, et que, tout en restant d’un remarquable niveau d’écriture, elle « tire à la ligne ». La jeune fille qu’est devenue Elizabeth ne cesse d’y dégorger sa haine et son désir de vengeance, et cette logorrhée sans nuance finit par lasser et devenir fastidieuse. Dommage. Faudra-t-il attendre la quatrième heure pour que Bourdeaut, sans pour autant bégayer, tende enfin la main à un autre Bojangles ?

Catégorie : Littérature française.

Liens : chez l’éditeur ; toutes nos critiques de Bourdeaut sont accessibles depuis le classement par auteur à la lettre B.

Quartier des Innocents

Marie-Hélène Moreau, Quartier des Innocents, Aethalidès, 2020

— Par Brigitte Niquet.

Encore un livre qui a pâti de la Covid et n’a pas eu, lors de sa sortie, la vitrine qu’il méritait — et c’est bien dommage. Marie-Hélène Moreau, dont nous connaissions surtout les talents dans le domaine du texte court (nouvelles et autres, tous parus chez L’Harmattan), s’essaie ici au roman noir chez un petit éditeur et c’est une réussite, tant sur le plan de l’intrigue, tortueuse à souhait, que sur celui du style, travaillé de façon à ce que chacun des dix protagonistes ait le sien.

L’intrigue se concentre dans un quartier d’une quelconque banlieue, baptisé Quartier des Innocents. A vrai dire, nul n’avait fait attention jusque-là à ce nom un peu bizarre, vu qu’il ne s’y passait rien, jamais. Mais voilà qu’un jour, un enfant disparaît sur le chemin de l’école, se volatilise littéralement, sans laisser la moindre trace, sauf son vélo abandonné en travers d’une allée. Et brusquement, tout change. Dix personnes, y compris les parents de l’enfant, dix personnes, toutes de ce même quartier, se retrouvent soudain sur la sellette et l’on découvre peu à peu qu’aucune n’a vraiment la conscience tranquille.

Outre ce presque huis clos, l’originalité du récit tient aussi dans sa construction : chacune des personnes susdites est l’objet d’un chapitre, fouillé jusque dans ses moindres détails (on peut faire confiance à l’auteur pour ça !) mais possiblement mensonger car les « innocents » sont aussi de grands menteurs – ou de grands taiseux, ou les deux à la fois. Bref, le flic qui mène l’enquête, lui aussi habitant du quartier, semble avoir du souci à se faire.

Quant au lecteur, il n’a plus qu’à se laisser porter, à condition de ne pas être un(e) adepte du happy end. Autant le dire tout de suite, chez Marie-Hélène Moreau, « noir, c’est noir ». A ne pas lire un soir de cafard.

Catégorie : Policiers et thrillers.

Liens : chez l’éditeur.

Le jour de ma mort

Jacques Expert, Le jour de ma mort, Sonatines, 2019

— Par Brigitte Niquet

Voici un petit polar qui, certes, ne révolutionne pas vraiment le genre mais qui est très bien fichu et accompagne volontiers un aller-retour Paris-Lille, par exemple. Charlotte, l’héroïne, a tout pour être heureuse mais s’aperçoit tout à coup qu’on est le 28 octobre, date de sa mort, du moins si elle en croit le charlatan (?) qui la lui a prédite trois ans plus tôt. Elle est seule chez elle avec son chat et elle panique, d’autant que son petit ami, qui a un comportement bizarre depuis quelque temps, joue ce soir les abonnés absents. Va-t-elle survivre à cette nuit maudite ? Est-ce elle qui fantasme alors qu’en prime, un tueur psychopathe rôde dans la ville ?

Le dénouement, que l’on croyait prévisible, ne manquera pas de vous stupéfier !

Catégorie : Policiers et thrillers.

Liens : chez l’éditeur.

Les enfants sont rois

Delphine de Vigan, Les enfants sont rois, Gallimard, 2021

— Par Brigitte Niquet

Et voici le dernier cru de Delphine de Vigan, romancière chérie du public et des médias, qui a choisi dans chacun de ses livres ou presque de dénoncer un dysfonctionnement de notre société.

Il s’agit ici d’enfants, sujet sensible s’il en fut. Enfants maltraités, battus, violés ou pire encore ? Non, au contraire, enfants stars toujours souriants, submergés face caméra de cadeaux et de gadgets indéfiniment renouvelables. Comment en sont-ils arrivés là ? C’est simple, ces enfants ont une mère, Mélanie, accro aux réseaux sociaux et surtout à la mine d’or qu’ils représentent pour les parents qui ont la chance d’avoir une progéniture photogénique et docile. Mélanie a donc créé une chaîne You Tube, Happy récré, dont ses enfants, Kimmy et Sammy, sont les héros. Filmés en permanence par leur mère, on les voit généralement occupés à déchirer des papiers-cadeaux ou à se régaler de sucreries diverses en poussant des cris d’extase. Les parents passent au tiroir-caisse (en plus, c’est parfaitement légal) et tout semble aller pour le mieux dans le meilleur des mondes.

Mais la bulle magique va imploser de manière inattendue. Un jour, Kimmy, dont on a déjà perçu qu’elle était moins docile que son frère, ne revient pas de l’école. Elle a apparemment été enlevée. C’est ici qu’entre en scène Clara, une jeune femme flic qui normalement n’a rien à voir avec l’enquête mais qui se sent irrésistiblement attirée par ce qu’elle pressent de monstrueux sous le vernis nacré.

Tout cela est très prenant, palpitant même, sans doute parce que la découverte de ce genre de dérive du monde moderne, moins connu que d’autres, nous fait entrevoir un univers dont nous ignorions jusqu’à l’existence et qui nous laisse sidérés, incrédules, alors que c’est un danger qui, en sourdine, nous menace plus ou moins tous. Bravo et merci à Delphine de Vigan !

Un bémol cependant : ce livre est trop long. L’intrigue aurait gagné, à mon sens, à être recentrée sur les personnages principaux (parents-enfants) et sur l’ouragan qui dévaste leurs vies, alors qu’ici l’intérêt se dilue entre l’écroulement de « la maison du bonheur » et la vie privée de la fliquette (qui n’en méritait pas tant), sans parler de la dernière partie qui nous projette dix ans plus tard dans un futur hasardeux. Un final un peu mitigé, donc, ce qui n’empêchera sûrement pas l’auteure de « cartonner ». C’est en bonne voie.

Catégorie : Littérature française.

Liens : chez l’éditeur ; nos autres critiques de D. de Vigan à découvrir à la lettre V du classement par auteur.

L’inconnu de la poste

Florence Aubenas, L’inconnu de la Poste, L’Olivier, 2021

— Par Brigitte Niquet

Habituée à ne lire pratiquement que des romans, j’avoue que dans un premier temps, j’ai été un peu décontenancée par la relative sécheresse du style de Florence Aubenas, journalistique et très peu littéraire. Mais j’ai très vite été fascinée par L’inconnu de la Poste, regrettant seulement que les aléas de la justice n’aient pas permis de faire coïncider la résolution juridique de l’affaire et la sortie du livre.

La méthode Aubenas, peaufinée avec l’affaire d’Outreau et celle d’Ouistreham, n’a plus à faire ses preuves. Partant d’un fait-divers hyper-médiatisé, c’est avec une détermination sans faille mêlée à une remarquable qualité d’empathie que la journaliste ne tient rien pour acquis, prend son sujet à bras-le-corps, s’y immerge pendant plusieurs mois, voire plusieurs années, gagne la confiance des protagonistes et ne lâche le morceau que lorsque, enfin, la vérité se fait jour.

Le cas qui nous occupe ici est à la fois symptomatique et atypique. Symptomatique parce que, comme souvent, les protagonistes, ce sont les paumés du coin – ici, une inénarrable bande de Pieds Nickelés basée à Montréal-la-cluse, petite commune rurale qui a cru trouver son salut dans l’usine de plastiques qui s’y est installée et qui a fermé ses portes quelques années plus tard, les laissant sur le carreau. Ils picolent, pointent au chômage, vivent de rapines et de troc mais globalement, ce sont de braves gens qui, comme on dit, ne feraient pas de mal à une mouche. La « mouche », c’est Catherine Burgod, la postière, tuée un matin de vingt-huit coups de couteau dans son bureau. A priori, tout le monde l’aimait. Qui l’a massacrée et pourquoi ? Atypique parce que, parmi les « braves gens », figure un OVNI : Gérald Thomassin, un jeune marginal sacré à 16 ans meilleur espoir de l’année cinématographique et titulaire d’un César, mais incapable de gérer sa vie. Rapidement, tout semble le désigner comme le coupable idéal, d’autant qu’il habite juste en face de la Poste. Et d’ailleurs il s’accuse lui-même. Mais ce n’est pas si simple.

Au lecteur maintenant de démêler cet imbroglio. Les faits datent de plus de dix ans et n’ont encore jamais été jugés. Le rôle de Florence Aubenas est terminé. Celui de la justice va peut-être enfin commencer.

Catégorie : Essais, Histoire…

Liens : Au moment de publier cet article, le site des éditions de L’Olivier est en maintenance mais vous retrouverez prochainement L’inconnu de la poste sur editionsdelolivier.fr. Aux éditions Points : La Méprise. L’affaire d’Outreau (2010) et Le quai de Ouistreham (2021).

Tout peut s’oublier

Olivier Adam, Tout peut s’oublier, Flammarion, 2021

— Par Brigitte Niquet

Amoureux inconditionnel du Japon, Olivier Adam exploite ici pour la 3e fois ses accointances avec ce pays, mais fidèle à lui-même, il oublie rapidement les arbres en fleurs, la beauté et la gentillesse des Japonaises dont il avait chanté les louanges dans ses deux livres précédents pour se centrer sur une particularité de la civilisation nippone : la façon dont on traite les pères divorcés au pays du Soleil levant, surtout quand ils sont étrangers. Quels droits ont-ils ? Aucun. C’est la mère qui les a tous, y compris celui de disparaître avec l’enfant issu de cette union, qui lui appartient à elle et à elle seule. C’est comme ça, c’est la loi et, là-bas, ça ne choque personne.

Ledit père se retrouve ainsi au centre d’un maelstrom qui le ballotte de tous côtés. Terrain connu pour ce « héros », un Nathan très proche d’Adam, qui ne cesse de porter en bandoulière son désenchantement, voire son désespoir. Quitté successivement par deux femmes sans qu’il ait compris pourquoi, Nathan est l’archétype du looser déjà rencontré dans maints livres de ce romancier. Le pire, c’est qu’il est sympathique, le bougre, mais qu’on a grande envie de le secouer et de lui dire : « Fais quelque chose, remue-toi, montre aux femmes de ta vie qu’elles sont quelque chose pour toi et peut-être qu’elles auront moins envie de te quitter ». Le drame qu’il est en train de vivre lui servira-t-il de révélateur ? Dans un sursaut, il décide de partir au Japon récupérer son fils coûte que coûte. C’est entre autres l’histoire de cette quête désespérée que nous raconte ce livre.

Tout peut-il s’oublier, suivant la belle formule de Brel dans l’indémodable Ne me quitte pas ? Peut-on oublier qu’on est père et abandonner sa progéniture à des milliers de kilomètres de la France, sans même un droit de visite ? Je vous laisse découvrir la réponse qu’Olivier Adam apporte (ou n’apporte pas) à cette question.

Catégorie : Littérature française.

Liens : chez l’éditeur ; voir aussi notre critique de Chanson de la ville silencieuse, du même auteur.

J’irais nager dans plus de rivières

Philippe Labro, J’irais nager dans plus de rivières, Gallimard, 2020

— Par Brigitte Niquet

Quel diable d’homme que ce Labro ! Manifestement, une vie n’est pas assez pour lui puisqu’il publie ici son vingt-septième livre et nous annonce déjà le suivant. Il n’a « que » 84 ans, il a encore le temps… Et d’ailleurs, s’il pouvait la recommencer, cette vie, il irait « nager dans plus de rivières », avec pour seul objectif « faire quelque chose de mieux que la fois précédente ». Qu’on se le dise !

En attendant, que nous propose son dernier opus ? Un joyeux fouillis (plus organisé cependant qu’il n’y paraît) où, à première vue, il semble ne parler que de lui, et il a choisi de le faire au cours d’une dizaine de chapitres disséminés dans l’ouvrage, qui commencent tous par J’emporterai et qui structurent l’ensemble. Car mine de rien, il a beau faire le malin, l’indestructible, l’insubmersible, il le sait bien, Labro, que l’échéance approche et qu’il est temps de se préoccuper des « bagages » qu’il emmènera dans l’au-delà. En tout cas, et ça il ne risque pas de l’oublier, il y aura la musique, la musique avant toute chose, toutes les sortes de musique et, d’ailleurs, il a déjà établi son best of, incontournable, qui occupe quatre pages et dont l’auteur nous avertit qu’il est loin d’être clos.

Ces chapitres très intimes alternent avec ceux où Labro parle des autres ou fait parler les autres, qu’il cite beaucoup – ce livre est un véritable florilège du genre – des autres célèbres ou parfois anonymes, que son métier de journaliste ou ses attirances personnelles lui ont permis de côtoyer, voire d’aimer, et quand ce type-là aime, il aime pour toujours (Quand j’aime une fois, j’aime pour toujours, chante son ami Souchon). Heureux sont ceux qui ont eu la chance d’être « portraiturés » par lui. Citons d’abord Johnny Hallyday, qu’on n’attendait pas là mais à qui tout un long chapitre débordant d’empathie est consacré, et pêle-mêle Picasso, Cocteau, Churchill, Mitterrand ou, plus près de nous, Gainsbourg, Luchini (magnifique hommage), Trintignant, Houellebecq et tant d’autres. « Chacun chante sa chanson, danse sa danse, chacun sa comédie, chacun son œuvre et son destin, chacun son histoire, parfois pleine de bruit et de fureur, mais elle n’est pas racontée par des idiots ». En effet. Parmi tous ses talents, Labro est aussi un maître-conteur.

Catégorie : Littérature française.

Liens : chez l’éditeur.

Girl

Edna O’Brien, Girl, Sabine Wespieser éditeur, 2019

— Par Brigitte Niquet

Edna O’Brien, riche d’une carrière littéraire couronnée par plusieurs prix, aurait pu s’en tenir là à l’aube de ses 90 ans.  Que nenni ! Elle repart en campagne, cette fois pour nous narrer sous forme semi-romancée le calvaire des lycéennes nigérianes enlevées, battues, violées, engrossées par les djihadistes de Boko Haram. La « voix » adoptée est celle de Maryam, une des victimes qui raconte son chemin de croix sur le mode du monologue, à la 1e personne. Curieux paradoxe quand on sait que Maryam est une pauvre gamine noire de onze ans et l’auteure – du moins avant que l’âge ne passe par là – une flamboyante Irlandaise rousse, nonagénaire ou presque à la sortie de ce livre. A priori, rien ne relie l’une à l’autre.

Et pourtant, ça marche. On y croit et c’est bien Maryam qu’on entend d’un bout à l’autre du récit. Passons sur les longues séquences de viols, parfois accompagnés de mutilations et de meurtres : elles sont horribles, décrites à la fois avec une précision chirurgicale et un incroyable détachement de la narratrice ; mais elles sont nécessaires pour nous remettre en mémoire ce que peut être la barbarie quand l’être humain, sûr de l’impunité, perd le contrôle de ses pulsions.

Cependant, ce n’est pas l’essentiel du propos, comme le titre pouvait déjà nous le laisser entendre. L’essentiel commence quand Maryam parvient à échapper à ses bourreaux et s’enfuit dans la forêt en emmenant le bébé que lui a fait un de ses tortionnaires. On assiste alors à la lutte acharnée que mène la jeune fille pour sauver sa vie et celle de l’enfant et retrouver les siens. Elle déchantera vite, d’ailleurs. Mais qu’à cela ne tienne : elle continue, féministe sans le savoir, décidée à prouver que, même et surtout dans des circonstances extrêmes, les femmes ont des ressources insoupçonnées et que, quel que soit le contexte, la liberté est toujours à conquérir.

Girl est un livre violent mais un beau livre, dont l’auteure mérite le respect et l’héroïne l’admiration, à moins que ce ne soit le contraire. Et sa dureté n’exclut pas définitivement l’espoir ni même le bonheur, comme en témoignent les dernières pages.

Catégorie : Littérature anglophone (Irlande). Traduction : Aude de Saint-Loup et Pierre-Emmanuel Dauzat.

Liens : chez l’éditeur.

Noël 2020 – Quels livres offrir ? Et si on faisait dans le rétro ?

— Par Brigitte Niquet

Noël 1950… Sophie a dix ans. Et quel cadeau l’attend sous le sapin ? Un livre, bien sûr ! L’habitude, prise très tôt, perdure, c’est tellement commode de savoir quoi lui offrir, tellement agréable de la voir battre des mains puis se lover dans un fauteuil et ne plus lever le nez que pour la bûche au chocolat… bref, c’est si facile de lui faire plaisir sans se casser la tête !

Quand elle y pense aujourd’hui, elle ne retrouve pas de souvenir précis de ses lectures de l’époque, mais c’est sans doute la série des Trilby qui a marqué son enfance. Elle ne se souvient plus des histoires qu’ils racontaient, mais elle croit toucher encore, là, du bout des doigts, la texture particulière de leurs couvertures. Après, les choses se gâtent.  Sophie est envoyée en pension et avec l’extinction des feux à vingt heures, pas question de lire au lit comme elle en a déjà pris l’habitude. Pas question ? Mais si, voyons, il suffit d’une pile électrique et d’un drap pour étouffer la lumière et c’est parti jusqu’à minuit et plus. Un peu en avance sur son âge (elle a commencé tôt), elle dévore les auteurs populaires de l’époque, Bazin et son fameux Vipère au poing, bien sûr, mais aussi une quantité d’autres. Barjavel fait un Ravage et Cesbron s’occupe des Chiens perdus sans collier. Quant à Troyat, Sophie apprécie particulièrement La neige en deuil, plus accessible à son âge que les grandes sagas russes. Mais le champion est assurément Kessel : Sophie a relu dix fois la mort du Lion et pleuré dix fois. Elle demande pardon à ceux qu’elle oublie, ils étaient si nombreux.

Et la voilà qui passe le bac et entre en khâgne, où elle va faire bien d’autres découvertes et passer la vitesse supérieure en matière de qualité de lecture. Elle papillonne de-ci de-là, classiques, modernes, et un jour, elle tombe sur un livre dont les premières lignes la sidèrent d’admiration : Il faisait un temps magnifique, un de ces ciels où c’est un bonheur qu’il y ait des flocons de nuages pour que quelque chose y puisse être de ce rose léger qui les rend plus bleus.  Quand on a écrit une phrase pareille, on peut mourir, pense-t-elle. Qui est cet auteur merveilleux ?

Aragon, dit son prof.

– Mais c’est un poète !

– Pas seulement. C’est aussi un romancier de génie.

Et le lendemain, il lui apporte quatre livres : Les beaux quartiers, Les cloches de Bâle, Aurélien et Les voyageurs de l’impériale. Sophie les serre contre son cœur, les dévore en quelques nuits d’insomnie, ne les rendra jamais au prof, les oubliera sur un banc, les rachètera, les lira et les relira toute sa vie. Ce qui n’empêchera pas d’autres émerveillements, d’autres engouements,  Cavanna et Les Ritals, Cohen et Belle du Seigneur, par exemple, mais jamais comme celui-là.

Aujourd’hui, Sophie a 70 ans. Elle éteint la lumière et se laisse glisser doucement dans les bras d’Aurélien, ou de Solal, peut-être… Elle espère avoir encore un peu de temps devant elle. Encore un peu de temps, Monsieur le bourreau…

Les livres dont il est question dans cet article (même les Trilby !) peuvent être commandés chez un libraire.

Aurélien

Louis Aragon, Aurélien, Gallimard, 1944 (disponible en Folio)

— Par Brigitte Niquet

Pour compléter mon évocation des « écrivains dans le rétro », je voulais parler plus longuement d’Aragon romancier, mais quel livre retenir ? Le choix a fini par s’imposer : ce serait Aurélien, peut-être parce que c’est le roman-phare de l’auteur, « l’un des plus admirables parus depuis Proust », dixit Yourcenar qui n’était pourtant pas tendre. Ou parce qu’il a été écrit en même temps et dans la même veine qu« Il n’y a pas d’amour heureux », mon poème préféré d’Aragon. Et enfin parce que, dixit l’écrivain lui-même, Aurélien a tellement à dire aux jeunes gens de toutes les époques et peut leur apprendre à mieux aimer. D’où sans doute sa pérennité, dont Gallimard se frotte les mains.

S’il leur apprend à mieux aimer, en tout cas, ce ne peut être qu’a contrario car dans le genre ratage, la relation qui unit Aurélien et Bérénice atteint des sommets. Déjà, ça commence mal. Nous sommes dans les années 20. Aurélien, de retour du front où il a passé 6 ans, est un dandy, célibataire et oisif qui traîne dans Paris (omniprésent et admirablement décrit) son ennui et sa mélancolie, en répétant ce vers de Racine devenu son leitmotiv : « Je demeurai longtemps errant dans Césarée » ; quant à Bérénice, c’est une jeune provinciale mal mariée, de passage à Paris, et pour tout arranger, la première fois qu’il la vit, Aurélien « la trouva franchement laide ». C’est la 1e phrase du roman, et ça augure mal de la suite.

Pourtant les amours d’Aurélien et de Bérénice vont presque aboutir. Lui est revenu sur ses préjugés esthétiques et elle, malgré ses angoisses, est prête à se rendre.  S’ensuit une sorte de très long flirt, une valse-hésitation dont les danseurs ne se décident pas à passer à  l’acte. Les tourtereaux vivent des moments à la fois idylliques et tourmentés dans la superbe garçonnière d’Aurélien qui domine l’Île Saint-Louis. Au mur, un masque de plâtre, celui de « L’inconnue de la Seine », que Bérénice brise par maladresse, une maladresse peut-être mâtinée de jalousie. Nous sommes à peu près à la moitié du roman et les amoureux, sans le savoir, viennent de franchir un sommet après lequel ils ne pourront plus que redescendre. La faute à Aurélien et à sa nature un peu pusillanime, la faute à Bérénice surtout, incapable au contraire de se satisfaire d’à-peu-près. « Il y a une passion si dévorante qu’elle ne peut se décrire. Elle mange qui la contemple. […] On ne peut l’essayer et se reprendre. On frémit de la nommer : c’est le goût de l’absolu. » On entend en écho le vers de Lamartine : « L’homme est un dieu tombé qui se souvient des cieux ». Tout est dit. Cette page est sublime, et c’est sans doute cela le vrai sujet d’Aurélien. Tout le reste n’est qu’habillage romanesque, magnifique, foisonnant mais secondaire.

Alors, bien sûr, si l’on prend les choses par le petit bout de la lorgnette, sept cents pages pour savoir si finalement Aurélien va baiser Bérénice, cela peut paraître ridicule, et insupportable à certains lecteurs. Aragon leur a répondu d’avance dans son Poème à crier dans les ruines :

« L’amour salauds l’amour pour vous/C’est d’arriver à coucher ensemble/Et après/Ah ah Tout l’amour est dans ce/Et après ».

Catégorie : Littérature française.

Liens : Aurélien en Folio. « Il n’y a pas d’amour heureux », la chanson, par Georges Brassens.

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