Lize Spit, Débâcle, Actes Sud, 2018
Par Françoise Ghilain.
Je viens de découvrir une jeune écrivaine belge, Lize Spit, 28 ans, éditée chez Actes Sud… à travers son roman Débâcle (*) qui fait un tabac et à juste titre ! Le titre en néerlandais est Het Smelt qui signifie « Ça fond »…
Un livre extrêmement bien construit… Une excellente traduction du néerlandais en français. Sur la couverture de ce livre en français : une photo d’enfant réalisée par la photographe Frieke Janssens… très interpellante aussi !
J’invite vivement tous les lecteurs des Yeux dans les livres à découvrir Lize Spit !
(*) Débâcle : rupture des glaces d’un cours d’eau.
Catégorie : Littérature étrangère (Belgique). Traduction du néerlandais : Emmanuelle Tardif.
Liens : chez l’éditeur.
Vu l’enthousiasme de Françoise, j’ai testé Débâcle. Le récit, au « je » et souvent au présent, est constitué de scénettes ou d’images successives. Cette construction en puzzle, par laquelle s’accumulent toute une série d’interrogations qui trouveront réponse plus tard, m’a assez vite ennuyée, hélas. Mais l’écriture est dense, un peu poétique, profonde comme les Belges savent être profonds. Est-ce que ce n’était pas le bon moment pour moi de lire un tel roman (je suis plutôt portée sur des lectures légères) ? Toujours est-il que je l’ai abandonné en cours de route, convaincue pourtant qu’il a de très grandes qualités.
J’ai testé Débâcle à mon tour, intrigué par ces avis contradictoires. En fait, les deux sont exacts : c’est un livre à découvrir, ambitieux et interpellant, qui laisse des traces dans l’esprit du lecteur. Mais la construction, en deux époques imbriquées, retarde chacun des deux récits et demande une réelle patience au lecteur, surtout pour ce qui concerne le récit fait au présent, qui progresse très lentement afin d’établir un suspense. Ce dernier est au rendez-vous, la fin ne se laisse deviner que tardivement, et au passage on aura savouré une foule de micro-anecdotes sur la vie quotidienne et familiale dans un village flamand, avec son lot de malaises et de désespérance. On voyage du côté de Brel, celui de ses chansons les plus grinçantes. Mais en suivant le point de vue d’une fillette, et la montée des hormones chez de jeunes garçons… Il y a une foule d’inventions frappantes, un très joli personnage de petite sœur mal dans sa peau, et des pages très fortes. Dommage que la scène clé, puissante, soit en même temps parfaitement irréaliste, en tout cas à mes yeux. Débâcle aurait pu être un grand livre si l’éditeur avait pris ses responsabilités ; en l’état, il vaut le détour si l’on aime la littérature existentielle.