Et je danse aussi

Anne-Laure Bondoux et Jean-Claude Mourlevat, Et je danse aussi, Fleuve éd°, 2015 (disponible en Pocket)

Par Brigitte Niquet.

Malgré le succès retentissant de certains romans épistolaires – citons  pour mémoire l’un des plus célèbres, devenu un classique, Les Liaisons dangereuses, et l’un des derniers en date, Le Cercle littéraire des amateurs d’épluchures de patates – j’avoue qu’a priori le genre ne m’attire pas, même si le passage de la plume au clavier (il s’agit ici, en fait, d’échange de mails) modifie un peu la donne. À vrai dire, si l’on ne m’avait pas offert ce petit bouquin avec un sourire entendu (« Ça va sûrement te plaire… »), je ne m’y serais certainement jamais intéressée. Et comme j’aurais eu tort !

Certes, dans les premières pages, il faut prendre patience, car la correspondance se met en place difficilement entre un écrivain célèbre, Pierre-Marie Sotto, ex-prix Goncourt en panne d’inspiration devenu plus ou moins misanthrope, et une de ses… de ses quoi, au juste ? admiratrices ? Ah ! Déjà, le doute plane. Non, Adeline Parmelan n’est pas vraiment – ou pas seulement – une admiratrice, et la grosse enveloppe qu’elle lui a envoyée et qu’il n’a pas ouverte ne contient pas forcément un manuscrit qu’elle voudrait lui faire lire bon gré mal gré. Et lui n’est peut-être pas tout à fait – ou pas seulement – l’ours mal léché qu’il prétend être devenu ou alors cet ours est blessé et s’est réfugié dans sa tanière pour lécher ses plaies. C’est un jeu de dupes où chacun protège ses secrets (surtout celle qui a initié cet échange de correspondances) et il faudra 122 mails (61 chacun) et quelque 300 pages pour que l’écheveau se démêle et que le lecteur, complètement bluffé, découvre l’incroyable vérité et se laisse submerger par l’émotion, que l’on n’attendait pas à ce détour.

Laissez-vous prendre par le charme de ce livre, vous ne le regretterez pas. Il date déjà de quelques années mais sa réédition en poche lui donne une seconde chance et il mérite de vivre dans la durée.

Catégorie : Littérature française.

Liens : au Fleuve, en Pocket.

5 commentaires sur “Et je danse aussi

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  1. Un délice que ce roman qui se dévore et se lit tout seul, et puis le genre épistolaire n’est pas si fréquent !

  2. Un délice, oui, je suis 100% d’accord ! C’est un de ces livres qui se dévore avec gourmandise et le genre épistolaire y est si bien exploité ! La construction est excellente et tant le rythme endiablé que le ton employé – la plupart du temps – par les protagonistes rendent heureux. Mais aussi, on veut toujours savoir la suite, et pour des raisons différentes d’une partie à l’autre de cette correspondance qui va en se complexifiant pour nous apporter encore et encore plus de plaisir, nous toucher aussi. Plusieurs petits suspenses se déroulent et s’enchaînent ; les personnages sont formidables ; au détour d’une lettre on éclate de rire, d’une autre, on serait près de verser une petite larme. Bref, c’est drôle, sensible et généreux. J’ai adoré !

  3. Catherine, je suis ravie que ce livre t’ait plu ! Ce commentaire répond amplement à la question de François Lechat qui hésitait à lire ce livre, craignant d’être déçu.

  4. Je dois dire qu’à mi-course j’ai compris quelque chose d’essentiel. Tu l’avais sans doute compris aussi – je n’ose pas dire quoi pour ne pas griller un plaisir aux lecteurs qui n’auraient pas encore ouvert le livre. Mais cela n’empêche pas qu’on se demande quand et comment cela va se révéler. Et puis il y a assez d’autres fils, intermédiaires, destinés à prolonger l’attente autant qu’à amuser, pour qu’on ne puisse lâcher le livre sous prétexte qu’on croirait en avoir compris un petit quelque chose. Tout est dans les échanges et leur qualité, et c’est très réussi. Bon, la toute fin est un peu attendue, mais sans plus et on ne peut pas s’en plaindre tellement c’est bien écrit.

  5. J’ai eu l’occasion de discuter de ce livre avec plusieurs personnes. De façon générale, le « scénario », comme dit Françoise Gh., est fort apprécié, mais la légèreté de l’ensemble laisse des impressions partagées et le style ne plait pas toujours. François Lechat soulève un réel manque d’originalité dans le début et à la fin, et de petits problèmes de style, notamment l’absence de différence entre les plumes des deux principaux personnages. Mais une fois embarqué, il a beaucoup aimé le roman. Comme moi, il a beaucoup aimé l’idée des « poussins perdus », mais ce genre de jolies trouvailles n’a parlé ni à Micheline ni à Lorette… Les avis sont donc assez partagés, finalement.

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