La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert

Joël Dicker, La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert, de Fallois/L’âge d’Homme, 2012 (aussi en de Fallois Poche)

Par Catherine Chahnazarian.

Ce roman policier, paru il y a six ans déjà, se lit avec passion. C’est que l’auteur y mêle au moins trois fils : l’histoire d’un grand amour (ou deux), une histoire d’amitié (hum… deux, finalement), l’histoire d’un jeune écrivain (pardon, deux jeunes écrivains) en proie à l’angoisse de la page blanche. On se trouve tour à tour dans les années 2000, en 1975, un peu avant, un peu après… Tout ceci rend l’intrigue riche, complexe et sinueuse, mais fluide et passionnante. Si vous ne l’avez pas encore lu, cela pourrait être votre gros-roman-à-lire-cet-été, sur une plage, dans une forêt, sur la route (mais pas au volant, bien sûr), dans une petite ville des Etats-Unis (ou d’ailleurs), au bar d’un bistrot-resto (en mangeant ou non des œufs au bacon). Tous ces lieux sont centraux dans ce roman à l’américaine écrit par un Suisse et coédité en France. Dans une construction savamment pensée, l’auteur déroule de bonnes scènes de rencontre, des interrogatoires et des confidences, de nombreuses fausses pistes et d’aussi nombreux rebondissements. Quelques facilités viennent troubler l’ensemble : une mère juive caricaturale, un flic qui enquête avec un écrivain (ce qui n’est pas du tout crédible mais très sympathique relationnellement). Mais Joël Dicker connaît les ficelles et sait les tirer. On comprend les lecteurs de 2012 : La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert a reçu le Prix de la Vocation Bleustein-Blanchet, le Grand Prix du Roman de l’Académie française et le Goncourt des Lycéens. Pour Arnaud Vivant cependant (voir l’Obs ci-dessous), ce roman ne serait qu’une pâle resucée de La tache de Philip Roth, ce que je ne peux discuter, n’ayant pas lu ce livre. Pâle du point de vue de la qualité de l’écriture, je peux le croire, car Roth est un très grand auteur et la plume de Dicker est simplement naturelle. Resucée, c’est difficile à imaginer tant la construction de ce livre-ci semble personnelle. Mais peut-être faut-il, à un énième degré de lecture, voir dans le personnage du jeune écrivain narrateur un aveu de dépendance à l’égard du maître ? Tout commence comme cela, en tout cas : Marcus Goldman ne respectera pas les délais de livraison de son second roman parce qu’il n’a pas d’idée et n’écrit pas une ligne. Il va chercher les encouragements dont il a besoin chez son ami et mentor, Harry Quebert, professeur de littérature et auteur d’un grand roman célèbre. Puis Harry a des ennuis et Marcus ne peut pas s’empêcher de vouloir lui porter secours… Dès les premières pages, ça y est, vous avez mis le doigt dedans et vous n’avez plus le choix : vous devez poursuivre votre lecture jusqu’au bout.

Catégorie : Policiers et thrillers (Suisse/France).

Liens : le roman en de Fallois Poche ; le site de l’auteur ; l’article de l’Obs ; nos autres critiques de Joël Dicker dans le classement alphabétique par auteur.

3 commentaires sur “La Vérité sur l’Affaire Harry Quebert

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  1. Comme j’avais bien aimé « La vérité sur l’affaire Harry Quebert » et qu’il est sorti en poche, j’ai acheté « La disparition de Stephanie Mailer » et je l’ai attaqué avec appétit. Mais le niveau n’est vraiment pas le même. La construction évoque celle de « La vérité… » mais force le respect : c’est complexe mais remarquablement bien fichu. Seulement comme trois flics enquêtent, il n’y a pas de héros, ce qui est dérangeant ; trois personnages excentriques sont ratés; des situations sont impossibles à croire ; il y a des redites, scènes inutiles, répétitions inutiles… Le tout dans un décor sans intérêt (cela pourrait se passer n’importe où ailleurs qu’aux États-Unis) et dans une langue peu travaillée (il y a des bizarreries qu’on serait tenté d’attribuer à la traduction, sauf que l’auteur écrit en français). Bref, le niveau n’est pas le même et l’on est tenté de penser que c’est faute de temps, que ce dernier roman en est resté à un stade de travail intermédiaire. Dommage. On lira le prochain opus, pour voir.

  2. Tout à fait d’accord, Catherine. J’ai été énormément déçue par ce livre qui n’est vraiment pas à la hauteur de « La vérité sur… ».

  3. Ce polar [La disparition de Stephanie Mailer] est avant tout beaucoup trop long et sans doute trop ambitieux. A partir d’ingrédients qui auraient pu être intéressants et d’une technique narrative qui, mieux menée, aurait pu être très captivante, l’auteur déploie le récit dans de multiples voies sans issue assorties d’un très grand nombre de personnages (qui nécessitent quand même une récap de 33 noms en fin de volume pour qu’on ne se perde pas trop !) Résultat : au lieu d’être séduit après un début d’enquête assez prometteur, le lecteur s’égare et se lasse progressivement, ne serait-ce qu’en raison de l’effort qu’il doit fournir pour ne pas se noyer dans les nombreux rebondissements invraisemblables d’une histoire compliquée à l’excès. On finit par renoncer à faire des hypothèses et à chercher un fil directeur. On se contente d’attendre la révélation finale qui tombe un peu à plat. Trop c’est trop. Dommage.

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