Jean Teulé, Héloïse, ouille !, Juliard, 2015 (disponible en Pocket)
Par Catherine Chahnazarian.
Mais quel drôle de titre ! s’exclame-t-on forcément. Titre qui s’explique… Je vous le dis ou je ne vous le dis pas ? J’hésite… Héloïse, ouille ! est un roman pseudo-historique grivois, comique, savant, salace, burlesque et bizarrement écrit, que j’ai reçu gratuitement pour en avoir acheté deux autres (pas du tout grivois et dont je vous parlerai peut-être une autre fois). Gratuit et pour adultes. Très franchement pour adultes ! Parce qu’Héloïse, si elle crie « ouille », c’est parce que… À moins que ce soit Abélard qui proteste parce qu’elle…? L’histoire de ce couple célèbre, revisitée par Jean Teulé, ne met pas plus de trois ou quatre pages pour tourner au roman érotique – et pas façon jeune fille en fleur. L’amour d’Héloïse et Abélard se transforme en obsession sexuelle maladive et on n’apprendra pas grand-chose sur la scolastique – tout en élargissant éventuellement son vocabulaire, érotique surtout. Le couple est pour le moins démythifié ; le célèbre maître, adulé de ses étudiants, devient un faiseur de chansons ridicule. Il faut 89 pages au chanoine Fulbert pour se rendre compte que sa nièce n’apprend ni le grec ni l’hébreu avec Maître Abélard tandis que nous, jusque-là, on les a vus dans toutes les positions. Page 99, elle découvre qu’elle est enceinte et les voilà qui s’enfuient… C’est page 104, alors qu’ils chevauchent une mule sur une route de campagne, elle devant et lui derrière… que j’ai personnellement décidé de ne pas mener jusqu’à son terme cette expérience « historique ».
Ceux qui veulent connaître la fin de l’aventure ou découvrir ce qu’est la scolastique se plongeront dans une bonne anthologie ou dans une encyclopédie réputée. Ceux qui veulent enrichir leur vocabulaire se feront offrir le Teulé. Car donc – et c’est le pourquoi de cet article –: en ce moment, pour un livre de poche acheté, il y en a un d’offert, dont celui-ci, dans un choix restreint, à portée de toutes les mains. Drôle d’idée, je trouve.
Catégorie : littérature française.
Liens : sur lisez.com.
Il fallait attendre la chute (pas de reins, mais celle de la critique… enfin, pas de celle qui l’écrit mais du papier… mais non, le papier n’est pas tombé, personne ne risque de tour de reins, voyons), bref, il fallait attendre la chute pour découvrir l’alibi (do ?) : qu’est-ce qui avait pu pousser Catherine a critiquer ce livre ? Et bien elle avait raison : ce cadeau offert à l’achat de deux poches risque de soulever un Teulé.
Merci pour cette critique, que je partage pleinement. Pour ma part, je n’ai pas dépassé la page 40… Le problème n’est pas que le livre soit cru, ou osé : cela pourrait être une qualité, et on a lu bien pire. Le problème est que Teulé n’assume pas son idée, son emprunt d’un couple mythique, qui valait mieux que ça – ou alors, qu’il fallait démystifier en ayant une raison de le faire, or aucune n’apparaît ici. Et le problème, surtout, est que l’auteur se sent tenu de parler « médiéval », ce qui nous vaut une prose déroutante et souvent indigeste, absconse plutôt que poétique (tout le monde n’est pas Michel de Ghelderode). Finalement, Teulé nous impose une lecture difficile alors que son seul argument est de nous émoustiller. S’il voulait faire un roman érotique, il aurait au moins pu le rendre plaisant.